David Khalfa Wikipedia – David Khalfa, co-directeur de l’Observatoire de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient de la Fondation Jean Jaurès, revient sur la flambée de violence actuelle en Cisjordanie dans une interview exclusive.
Le Figaro (LE FIGARO) – Plusieurs centaines de colons se sont rendus il y a huit jours sur la ville palestinienne de Huwara et l’ont ravagée en réponse à une attaque qui a tué deux d’entre eux. Une catastrophe aussi massive et violente ne s’est jamais produite auparavant. Quel genre d’analyse avez-vous fait ?
C’est David KHALFA. – Les villages du « triangle de fer » sont parmi les plus rudes de Cisjordanie, et c’est de là que sont originaires ces jeunes. Lors de mon séjour dans ces communautés, j’ai été impressionné par deux choses : la fervente religiosité de ces jeunes, imprégnés de spiritualité « new age » ; et leur nationalisme anti-légaliste et antiétatiste.
Le meurtre de deux adolescents israéliens par un Palestinien est la cause immédiate de cette expédition de représailles, mais la radicalisation qui a conduit à ces actes de représailles remonte à l’évacuation de la bande de Gaza par Israël en 2005. Ce retrait a été ressenti comme une calamité. d’une ampleur sans précédent…
L’extrait suivant d’un entretien avec David Khalfa est disponible ci-dessous. Cet expert du Moyen-Orient explique comment le mouvement islamiste a exploité les failles de la sécurité israélienne pour lancer son attaque.
David Khalfa : Les dirigeants israéliens doivent toujours garder le pays en alerte en raison de son histoire, de son environnement régional et de sa petite taille. Dans cette situation, le niveau politico-militaire considérait le front nord, et en particulier le Hezbollah, comme la plus grande menace pour la sécurité d’Israël.
Les responsables israéliens n’ont pas tenu compte de la détermination du Hamas à amener le conflit à l’intérieur d’Israël, à lancer une attaque terroriste d’une telle ampleur et à risquer une contre-offensive qui pourrait sonner le glas du mouvement islamiste.
L’échec des services de renseignement israéliens à empêcher l’attaque du Hamas était « historique »,
Des milliers de missiles ont été tirés depuis la bande de Gaza vers Israël samedi alors que le parti islamiste palestinien Hamas a lancé une attaque sans précédent, traversant la frontière solidement défendue en de nombreux points par voie aérienne, terrestre et maritime.
Le spécialiste du Moyen-Orient, David Khalfa, a qualifié l’offensive d'”échec historique” pour les services de renseignement israéliens, car elle a pris le gouvernement par surprise.Les terroristes du Hamas ont continué à engager des tirs dans diverses communautés israéliennes proches de Gaza quelques heures après le début de l’attaque.
Au moins 40 personnes ont été tuées et des centaines d’autres ont été blessées, selon l’agence nationale de secours israélienne, ce qui en fait l’attaque la plus sanglante dans le pays depuis des années.
Avec la bande de Gaza, la Cisjordanie fait partie du territoire où les Palestiniens souhaitent depuis longtemps former un État. Cette escalade survient donc dans un contexte d’effusion de sang croissante entre Israël et les terroristes palestiniens.
Cela coïncide également avec une période de troubles politiques en Israël, où les tentatives de réforme du système judiciaire du pays ont révélé de profondes divisions au sein des dirigeants du pays.
Les civils israéliens sont la cible de l’opération meurtrière « Tempête Al-Aqsa » du Hamas, selon David Khalfa, co-directeur de l’Observatoire de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient au sein du groupe de réflexion français Fondation Jean-Jaurès.
Pourquoi cette attaque est-elle si inédite, France 24 ?
David Khalfa : L’assaut est d’une ampleur et d’une complexité inégalées. Israël n’a pas fait face à une invasion terrestre à grande échelle [comme celle-ci] depuis la guerre du Yom Kippour [à Yom Kippour, le jour des expiations juives, en 1973, une alliance arabe dirigée par l’Égypte et la Syrie a lancé une attaque surprise contre Israël, ndlr
Lorsque nous parlons des forces commando du Hamas, nous parlons de véritables forces spéciales au niveau de l’armée qui opèrent en profondeur sur le territoire israélien. Aguerris au combat, bien entraînés et dotés de ressources tactiques de pointe, ils mènent la guerre sur plusieurs théâtres à la fois.
Ils ont envoyé huit camionnettes, chacune avec environ huit hommes armés islamistes du Hamas, pour circuler dans les villes et villages israéliens, kidnappant des otages et ouvrant le feu sur des citoyens non armés.
Il s’agit d’un assaut surprise extrêmement bien planifié et exécuté, qui nécessite des renseignements et une planification considérables de la part du Hamas. Le Jihad islamique d’un côté, le Hezbollah et l’Iran de l’autre ont probablement fourni une aide logistique. Cela contribuerait à expliquer considérablement la situation actuelle.
Qu’est-ce qui a empêché les renseignements israéliens d’anticiper cela ?
David Khalfa : Il s’agit d’une perte catastrophique pour les services de renseignement israéliens. Il s’agit d’une erreur monumentale qui, sans exagération, pourrait être comparée aux événements de 1973.
Israël est une nation toujours en état d’alerte, prête à entrer en guerre à tout moment. Il est évident qu’il existait un certain niveau de manque de préparation, probablement dû à des analyses et calculs inexacts de la part des services de renseignement israéliens, mais aussi à la préparation des forces spéciales israéliennes.
Il semble que l’armée israélienne soit elle aussi incrédule. Le pays est plongé dans une atmosphère de guerre et le plan du Hamas ne repose pas seulement sur la surprise mais aussi sur des manœuvres militaires coordonnées.
L’assaut comportait des composantes terrestres, maritimes et aériennes. Peut-être que cela a pris les Israéliens au dépourvu.Israël est un pays qui utilise la technologie pour prévenir les problèmes avant même qu’ils ne surviennent. L’incapacité à anticiper correctement les événements et à évaluer le niveau de danger était évidente.
Une attaque israélienne via le Hezbollah dans le sud du Liban était le pire scénario anticipé par les services de renseignement israéliens. Ils ne l’ont pas vu venir.
David Khalfa : Israël est au milieu d’une crise politique et institutionnelle aux proportions historiques, que cette attaque terroriste n’a fait qu’exacerber. Mais il y a aussi un problème d’identité, la société israélienne étant de plus en plus divisée et polarisée.
Le Hamas n’a pas caché sa volonté d’exploiter la faiblesse d’Israël pour mener des attaques de cette nature.Depuis des mois maintenant, les manifestations hebdomadaires contribuent à une crise nationale persistante qui déstabilise Israël. Depuis hier, 6 octobre, les commémorations du 50e anniversaire de la guerre du Kippour ont officiellement commencé.
Tant symboliquement qu’en termes de communication, le Hamas est clairement déterminé à suivre les traces [de la coalition arabe, ndlr] avec la volonté de frapper fort et de frapper vite.
Les Israéliens sont aussi surpris que choqués.Attaque du Hamas contre Israël : Un expert du Moyen-Orient a déclaré : « Cette opération est sans précédent en termes d’ampleur et de mode opératoire ».
Le territoire israélien a été attaqué depuis les airs, la terre et la mer, comme l’a noté le codirecteur de l’Observatoire de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient, David Khalfa. Il y avait un homme nommé Jean Jaurès.
Depuis la bande de Gaza, plus de 5 000 missiles ont été tirés et des commandos sont entrés sur le territoire par voie maritime, aérienne et terrestre. La branche militaire du mouvement palestinien Hamas a lancé samedi 7 octobre une opération de grande envergure contre Israël.
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a utilisé le mot « guerre » pour décrire la situation et la communauté mondiale a vivement critiqué l’attaque du Hamas. David Khalfa, expert du Moyen-Orient et codirecteur de l’Observatoire de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient à la fondation Jean-Jaurès, s’inquiète du fait que “nous nous dirigeons vers une guerre de longue durée”.
Pourquoi le Hamas a-t-il lancé son attaque contre Israël maintenant, Franceinfo ?
David Khalfa : Le premier est symbolique, puisque cette année marque le 50e anniversaire du déclenchement de la guerre du Kippour [le 6 octobre 1973, lorsqu’une alliance militaire dirigée par la Syrie et l’Égypte a attaqué Israël].
Le Hamas arrive au bon moment et espère activer une imagination islamo-nationaliste avec cette frappe, une idée qui a un certain écho parmi les factions les plus extrémistes du monde arabo-musulman.Deuxièmement, le bilan du Hamas en tant qu’entité dirigeante dans la bande de Gaza est lamentable. C’est un gouvernement totalitaire dont le seul souci est de rester au pouvoir.
Le Hamas a enfin reconnu une vulnérabilité qu’il envisage d’exploiter : la polarisation de la société israélienne. Le pays est au milieu d’une crise politico-institutionnelle sans précédent, avec des manifestations hebdomadaires.
Nous ne pouvons pas non plus ignorer le rôle de l’Iran ; la République islamique considère les pourparlers de réconciliation en cours entre l’Arabie saoudite et Israël comme une insulte et vise à nuire à la réputation mondiale d’Israël en le poussant à un conflit terrestre désastreux.
Qu’est-ce qui rend cela incendiaire maintenant ?
L’ampleur et la méthodologie de cette opération n’ont jamais été tentées auparavant. C’est vaste et intelligent puisqu’il implique des assaillants qui se sont rendus loin en territoire israélien par voie maritime, aérienne et terrestre.
Les islamistes palestiniens ont tiré plus de 5 000 roquettes sur le territoire israélien dans le but de submerger la défense anti-aérienne israélienne. La grande majorité des victimes sont des passants innocents, ce qui en fait un événement sans précédent. Le Hamas a enlevé du personnel militaire et des civils, y compris des familles entières avec de jeunes enfants.
Qu’est-ce qui explique l’apparent manque de prévoyance d’Israël ?
Certains Israéliens qualifient déjà cette frappe d’échec historique de l’armée et des services de renseignement du pays. Des inquiétudes ont été exprimées concernant les services de renseignement israéliens, qui constituent sa plus grande force. Le pays dans son ensemble subit un effet de choc. Des spectacles apocalyptiques et une panique généralisée caractérisent ce scénario désastreux.
La difficulté opérationnelle évidente de Tsahal (Forces de défense israéliennes) à reconnaître les commandos qui ont pratiquement envahi les rues du sud du pays contraste fortement avec la réputation d’Israël en tant que puissance militaire technologiquement avancée.
Depuis sa création, la nation a maintenu un état de guerre et une vigilance constante, mais elle n’a pas été suffisant pour empêcher cela. Alors qu’Israël est généralement celui qui donne le ton, dans ce cas-ci, c’est le Hamas qui a décidé où, quand et comment agir.
Après un assaut aussi dévastateur, faut-il envisager la guerre ?
Même si le Hamas a remporté une victoire symbolique, lui-même et les quelque deux millions d’habitants de la bande de Gaza en souffriraient gravement à moyen et long terme. Nous parlons ici de semaines, voire de mois. Israël riposte par des frappes aériennes, puis lance peut-être une invasion terrestre. Il s’agit d’une véritable guerre qui va durer un certain temps.
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